Bientôt la fin de la trêve estivale
Levers de soleil de plus en plus tardifs
Inexorablement
Chaque matin une photographie, de ma fenêtre, chaque soleil unique
Comme pour engranger les émerveillements de l’été, ne pas oublier
Nostalgie du début, de tous les possibles qu’on s’était promis de savourer
On n’a plus le temps de tout
Le village se vide peu à peu de ses vacanciers
On accueille le silence
Avant le retour aux vibrations de la grande ville, au chaos des certitudes qui s’entrechoquent, aux éclats de voix péremptoires
Avant la plongée dans les débordements, les absurdités, les explosions, les maladies du monde qu’on a tenté de tenir à distance tant bien que mal
On les a mis en sourdine, pendant quelques semaines, pour ne plus se sentir envahi, imbibé, traversé, rongé
Et puis reviennent insidieusement
Désarroi, anxiété sourde, tentation de se recroqueviller
Rentrée scolaire, rentrée sociale, rentrée politique, rentrée littéraire…
Comment transformer l’« intranquillité » en ressort ? Comment embrasser la vie dans toutes ses dimensions, même celles qui nous font peur ? Comment rester en mouvement ?
Les textes taoïstes anciens évoquaient trois forces, en nous prisonnières, qui empêchent le souffle de circuler librement
Agressivité, répulsion
Dépendances affectives, addictions
Conceptions érigées en dogmes, opinions définitivement arrêtées…
Les poètes chinois du courant « Aller avec le vent » nous indiquent un chemin de sagesse, comme un art de vivre en résonance avec les vagues du temps
Alors que dépressions et anticyclones se succèdent
Inexorablement
Un chemin
Connaitre notre nature, ses potentialités, ses contradictions, ses tentations mesquines et destructrices
Se méfier des mots qui figent et qui pervertissent
Refuser toute adhérence à des idées, qui effacerait la polyphonie du vivant
Se soucier du lien, agir dans le monde
Et savoir aussi s’en retirer
Pour se restaurer, revenir à la source
S’accorder au diapason de tous les plaisirs minuscules, les joies paisibles, les tristesses douces
Être à l’écoute de ces moments de cohérence avec soi-même, qu’on peut ressentir, même fugitivement, et quelle qu’en soit la couleur
Tout au fond de soi, calme, lumineux, frais, mystérieux, reflétant les nuages
Comme un lac de montagne ...